« Elle et lui » une comédie pimpante d’Isabelle Mergault au théâtre des Nouveautés, mise en scène par Christophe Duthuron, avec laquelle encore une fois elle gagne son pari de déclencher les rires : « ses petites pièces de boulevard » s’élèvent au rang du répertoire des pièces au succès assuré.
J’ajouterai avec sincérité et bonheur : écrites par une femme !
« La vie étant une farce », autant en faire et cela réussit à Isabelle Mergault qui a le chic pour trouver la bonne réplique, le bon mot, qui font mouche à chaque fois et emportent le public dans l’hilarité.
Témoin de cette soirée où souvent les rires effaçaient le texte tellement le public était réceptif à ses histoires.
Isabelle Mergault l’a bien compris, on n’est jamais mieux servi que par soi-même, étant l’auteur de nombreuses comédies à succès. Elle prend un plaisir à jouer dans ce théâtre des Nouveautés où elle a pris son rythme de croisière, comme ce fut le cas avec sa dernière pièce « La Raison d’Aymé » (Cliquez), jouée à guichet fermé.
Pour sa sixième comédie « Elle et lui », elle est bien réelle et en bonne mère de famille, femme au foyer fatiguée, elle s’occupe de son clan et veille sur lui : pas touche ou je mords.
Un clan composé d’un mari Ron, obsédé par l’univers de la voiture et ses dommages collatéraux, d’un fils Gildas ayant pris le virage d’un « Tanguy » envahissant, pléonasme, porté pour sa part un peu trop sur la nourriture mais aux doigts habiles de créateur de mode et d’une maman Patricia, Pat pour les intimes, aux petits soins pour ses hommes mais qui aspire à une vie moins « ménagère » qui lui occasionne des montées de tension.
En somme une petite famille idéale comme on en rencontre un peu partout en France.
Jusqu’ici il n’y a pas de quoi fouetter un chat, la pauvre bête ; alors il fallait bien corser un peu l’histoire et c’est là que débarque en frappant à la porte du modeste appartement, très joliment décoré par Bernard Fau, une superbe créature perchée sur des hauts talons venue au prétexte de faire un sondage…
D’un premier abord Pat est troublée par le comportement de cette personne, mais après les amabilités d’usage, reçoit dans sa jolie petite frimousse, comme un uppercut qui a bien failli la mettre chaos : l’évidence que cette femme prénommée Jeanne n’est en fait que son mari Jean qu’elle avait épousé dans sa jeunesse de femme insouciante à Las Vegas.
Un homme qui depuis deux années est une femme, ceci après intervention chirurgicale et traitement hormonal, et a réalisé son rêve : devenir une chanteuse de cabaret.
Une chanteuse qui fuit son impresario véreux et se réfugie dans l’appartement qu’elle a connu au temps de ses amours avec Pat quand elle était un homme…un impresario qui finira par pointer le bout de son nez et apporter de nouveaux rebondissements à cette comédie.
Mais point très important pour maintenir le suspens, une union qu’il faut absolument cacher à Ron et Gildas.
Et voilà, les quiproquos vont s’enchaîner tambour battant, dans une mise en scène endiablée de Christophe Duthuron, pour notre plus grand plaisir. Car il va bien falloir présenter au clan cette nouvelle venue et expliquer pourquoi elle va cohabiter, le temps de se retourner, avec la famille.
Des scènes, comme celle de Ron présentant à la tribu, dans un délire réjouissant, son projet de panneaux indicateurs routiers, que les chinois lui ont fait l’honneur de commander pour leurs routes, ou encore celle de la drague de Ron sur Jeanne communiquant par oreillette interposée, commandée par Pat, jusqu’à la scène finale en forme de revue de cabaret sur une musique colorée de Yannick Hugnet, vont de minute en minute, que l’on ne voit pas passer, déclencher les rires en cascade, pour au final vous faire sortir du théâtre le sourire aux lèvres et terminer votre soirée dans la bonne humeur : que demander de plus !?
Christophe Duthuron, assisté de Tadrina Hocking, qui maîtrise les codes de la comédie, a parfaitement compris le mécanisme de pensée d’Isabelle Mergault et dirige ses comédiens avec un amour de la scène qu’ils lui rendent bien.
Habillés des costumes de Frédéric Olivier, les comédiens s’en donnent à cœur joie pour nous amuser.
Laurent Gamelon, le nounours que l’on a envie de cajoler malgré son caractère épouvantable de macho, à qui on a envie de donner des baffes, joue parfaitement l’ambivalence du personnage.
Le fils un peu nunuche, mais qui s’en sort haut la main dans ses projets de styliste, emporte avec ses pitreries l’adhésion du public en la personne de Jean-Louis Barcelona.
Celui qui vient mettre son grain de sel et relancer la roue pour un nouveau tour de quiproquo est le joyeux petit diable sous les traits de Rémy Roubakha.
Philippe Vieux que j’avais apprécié récemment dans « Palace » (Cliquez), où il jouait un directeur à l’univers lunaire, s’est métamorphosé en splendide chanteuse de cabaret et fait oublier qu’il est un homme. Il est d’une crédibilité sans faille dans son personnage.
Quant à Isabelle Mergault, notre nouvelle reine du boulevard, elle emporte tous les suffrages et délicatement, avec amour, fait beaucoup rire en distribuant les cartes et en s’effaçant devant ses partenaires pour les mettre en valeur.
Cette comédie a pour but de vous faire rire, de vous faire oublier vos tracas quotidiens : eh bien c’est une nouvelle fois réussi !
A déguster sans modération.
« Elle et lui » au théâtre des Nouveautés, du mardi au samedi à 21h, matinées le samedi à 16h30 et le dimanche à 16h.