Le temps de vivre

 

« Le temps de vivre » un seul en scène de Camille Chamoux mis en scène par Vincent Dedienne, sur la scène du théâtre de La gare du midi à Biarritz, un évènement Entractes Organisations, est un voyage dans le temps pour dire « oui à la vie ! » et qu’il n’est jamais trop tard pour ouvrir ses yeux sur le monde qui vous entoure dans l’espace temps qui est le nôtre.

 

Quand deux finesses d’esprit se rencontrent, cela donne un seul en scène drôle, émouvant, tonique, où le temps qui passe ne se mesure pas. Vincent Dedienne avec sa délicatesse qui le caractérise a su placer sur les secondes, les minutes qui composent ce seul en scène un rythme qui égrène le temps comme une plume qui vole au gré du vent tantôt tourbillonnant, tantôt léger comme une brise.

Une table, un banc, quatre chaises, divers bibelots sur la table dont un biberon, le tout sur un tapis moelleux. Une scénographie de Nicolas Marie qui nous laisse penser que nous sommes dans l’intérieur de celle qui pendant 70 minutes chrono va nous conter un pan de sa vie, dans des réflexions mesurées, judicieusement pensées et dévoilées dans un rythme qui nous convie, bien installé au fond de nos fauteuils, dans un mélange de rires et de tendresse.

Camille Chamoux, habillée par Constance Allain, arrive sur scène dans un silence de cathédrale, elle chausse ses lunettes puis dans une lecture, saine au demeurant, elle nous fait part de son observation qui l’interpelle : « Car avec qui devons-nous nous réconcilier pour être heureux ? ». Telle est la question sur laquelle Camille Chamoux va disserter pendant son seul en scène à la recherche du temps perdu. Avec le concours de Marcel Proust et de sa madeleine, dans une introspection sans état d’âme, sans animosité, elle pose les mots sur un mal qui nous ronge insidieusement : celui du temps qui passe et que nous ne pouvons pas contrôler. Cette fameuse finitude qu’il faut à tout prix déjouer, défier, pour rester maître de son temps : mais est-ce possible ?

Notre vie serait-elle minutée ?
Arrivons-nous à faire la différence entre un minuteur et un chronomètre ?
Deux appareils qui mesurent le temps mais pas dans le même sens.
Et c’est là que tout repose sur cette réflexion sur le temps qui passe. Comme celui du confinement avec la Covid qui nous a tous paralysés. Un confinement qui lui aura permis d’écrire son seul en scène avec la complicité de son amie Camille Cottin : deux Camille valent mieux qu’une me direz-vous, eh bien le résultat est à la hauteur de notre espérance.
Une écriture fine, poétique, qui met le doigt discrètement sur ce qui fait mal et que nous occultons volontairement pour paisiblement poursuivre notre chemin de vie sans se soucier de notre entourage.

De l’émotion, de l’humour toujours présent au détour d’une pensée, se conjuguent aux rires spontanés dans une interaction avec le public qui suit son parcours de femme, de mère, de ses visites dans les musées, et quelles visites, de son plaisir de vivre le moment présent loin des contraintes domestiques, du couple, qui ne s’effacent pas d’un coup de baguette magique.

De Waze en passant par Whatsapp, son chemin est tout tracé pour nous embarquer dans son univers quelque peu surréaliste mais si proche de la réalité.
Tous les aspects de la vie, avec sa part de religion, ses boomers, le racisme, la pédophilie, la maltraitance, sont évoqués dans une catharsis qui n’en a que le nom, sans oublier de citer malicieusement celui de Virginie Despentes…

Etre heureux est-ce anticiper ?
La clef du temps qui passe…ne pas le mesurer, vivre l’instant présent dans une urgence d’apaiser.
Il n’est jamais trop tard pour vivre heureux, pour vivre tout simplement, mais comme l’a si bien écrit Boris Vian dans sa chanson « Juste le temps de vivre » : « Pourvu qu’il me laisse le temps »…

 

« Le temps de vivre » sur la scène du théâtre La gare du midi, un évènement Entractes Organisations, le 28 mars 2023.
Prochaines dates : le 29 mars à Arcachon, le 30 mars à Saint-Ave, le 12 avril à Noisy le Sec, le 13 avril à Fougères.