« Dido Æneas Us & All » un ballet de Samir Calixto, sur une musique de l’opéra « Didon et Enée » d’Henry Purcell, dansé sur la scène du Théâtre du casino municipal de Biarritz est une ode à l’amour transcendée par deux interprètes habités viscéralement par leurs rôles.
Didon et Enée est l’opéra baroque, considéré comme un chef d’œuvre, en trois actes d’Henry Purcell créé en 1689 à Londres.
La reine Didon aime en secret Enée, un prince de Troie. Comment concilier cet amour sans trahir son peuple ? Telle est la question et le cheminement que propose Samir Calixto dans cette création qu’il nous présente ce soir dans le cadre du festival « Le temps d’aimer la danse ».
Samir Calixto voit dans cet opéra les mêmes signes qui abreuvent aujourd’hui notre monde tourmenté.
Un monde pour lequel il analyse minutieusement le rapport humain, la confrontation des opposés qui se réunissent dans un même élan de fraternité, d’amour absolu, inconditionnel à la passion : succomber ou ne pas succomber à l’amour, telle est la question.
Pendant plus d’une heure il va nous proposer sa vision de cet opéra où l’amour triomphera d’une certaine manière.
Des pas de deux enfiévrés avec sa partenaire Erika Poletto qui nous donneront des frissons jusqu’au bout de nos extrémités, en éveil permanent, unissant notre souffle à celui des danseurs, vivant ainsi leur passion exaltante dans un hymne à l’amour révolutionnaire.
Une cour sensuelle, animale, s’établit, se connecte entre Enée et Didon dans une précision du geste éblouissante, fascinante. Des glissés, des jetés, des épaules, des déhanchés, qui s’accordent dans une coordination au centimètre près, à la note près, dansés sur un rythme effréné. Un considérable travail d’orfèvre qui s’efface devant tant de grâce, de sensibilité.
La conjugaison des planètes sous l’orage annoncé renforce dans un tonnerre fracassant cette quête de l’absolu où l’explosion de l’amour pointe son horizon annonciateur de la fin d’une idylle.
Trois actes et un prologue qui malmènent nos deux danseurs complètement investis dans leur transposition de cet amour mythique avec un Samir Calixto qui tel un Glenn Gould alimente sa gestuelle par des sons marqués d’une empreinte, d’une présence enthousiaste à la passion décuplée de vivre.
Chacun dans leur solo nuancé par leur intensité, leur puissance, viendra dans un travail des lumières remarquable de Pavla Beranová promouvoir son amour qu’il dévoue à l’autre, cherchant sa place dans ce couple qui ne demande qu’à s’aimer d’un amour total et sincère.
En sont-ils seulement capables ou incapables ?
A la recherche de l’amour : trouveront-ils leur place dans cet univers en perpétuel mouvement ?
Le télescope présent sur cette scène à la blancheur virginale apportera-t-il la réponse ?
Un télescope qui permet dans certaines occasions d’approfondir la recherche de la lumière qui éclaire notre couple dans cette nuit orageuse.
Le dernier acte dépouillé de toutes contraintes vestimentaires, de toutes peaux, suggérant un barrage à la sincérité de leur amour marquera par son intensité l’union sacré de deux êtres surveillés par les dieux de l’Olympe qui n’ont pas dit malheureusement leur dernier mot…dans un rougeoiement du plus bel effet.
Erika Poletto – Didon et Samir Calixto – Enée, un couple à la fois mythique et ancré dans le présent dans une passion dévorante qui pose la question de la place de l’Amour dans le couple, la vie.
Une création qui marquera ce festival « Le temps d’aimer la danse » pour laquelle le public a réservé une ovation sincère et méritée.
« Dido Æneas Us & All » au Théâtre du casino municipal de Biarritz, le 14 septembre 2022.