Dernier carton

 

« Dernier carton » d’Olivier Balu au théâtre du petit Gymnase dans une mise en scène de Laurent Ziveri est un huis clos qui déménage par ses rebondissements.

 

affiche-dernier-carton« Dernier Carton », une pièce qui a vu le jour il y a dirons-nous quelques mois et que le jeune et talentueux auteur a décidé de mettre dans les mains d’un metteur en scène chevronné.
Le résultat est surprenant, nous sommes happés par la tension grandissante de cette confrontation entre deux hommes aux univers complètement différents, opposés tant dans leur intellect que dans leur culture : l’un est issu des beaux quartiers et l’autre de la banlieue.

Au lever du rideau, nous sommes dans l’appartement de Richard, un présentateur vedette du petit écran d’une émission littéraire qui fait les belles soirées de sa chaîne.
Trônent au milieu de la pièce, qui semble être le séjour, un escabeau et un carton : le dernier du déménagement sur lequel Richard est assis…
Diane, la femme de Richard l’a quitté et il a décidé de fuir ce foyer qui n’en est plus un.

Le déménageur a laissé son collègue dans le camion et vient prendre congé de Richard en lui faisant signer le bordereau d’intervention.IMG_4337

Une rencontre brève qui tourne court au développement de l’intrigue, mais c’est sans compter la plume d’Olivier Balu qui sans cesse nous captivera avec les moult rebondissements qu’il a concoctés, jusqu’à la scène finale qui pourrait bien donner une suite à ce huis clos.

Mais ne brûlons pas les étapes et revenons dans ce salon où se dévisagent nos deux hommes et essayons de comprendre ce qui les retient dans ce face à face à l’allure tendue.

En effet, le déménageur devient de plus en plus envahissant mettant mal à l’aise Richard qui ne sait plus quoi faire pour s’en débarrasser, lui qui est fortement perturbé par le départ de son amour.
Un départ qui ne s’explique pas même si nous comprenons que la différence d’âge pourrait être l’une des raisons.

Un déménageur envahissant qui semble être à ses heures perdues un écrivain.
Il a d’ailleurs adressé son manuscrit à Richard par l’intermédiaire de la chaîne, mais il semblerait que ce dernier ne l’ait pas reçu…

Commence alors une confrontation entre le jeune homme, qui pourrait être son fils, et cet homme d’âge mûr déboussolé par l’épreuve qu’il traverse : le loup, chef de meute, contre le renard, à la jeunesse et la vivacité insolentes.
Le déménageur veut absolument savoir si Richard a lu son livre ! Rien d’autre ne l’intéresse !
Il s’ensuit alors des répliques acides, virulentes.
Au fur et à mesure que le fil de la pelote de leur vie se déroule, ils sont tour à tour agressifs, violents et les masques tombent.IMG_4341
Des mots qui sortent de leurs bouches comme un exutoire à leurs conditions d’homme, des mots qui les lient le temps d’une soirée au-delà de leurs peurs et doutes.

Ils vont se livrer sans pudeur, avec leurs émotions, se mettre à nu pour mieux casser les codes des barrières sociales qui les séparent.
Ils vont confronter leurs vérités pour mieux se comprendre et avancer dans cet échange qui va bien au-delà d’une simple rencontre dans un hasard des plus troublants…
Ils sont tous les deux au bord d’un précipice : qui va sauter le premier ?

Un suspens très bien ficelé, à l’humour noir, qui va à l’essentiel dans son écriture et qui nous tient en haleine jusqu’à la scène finale.

Laurent Ziveri a su tirer partie avec intelligence et rigueur de tous les rebondissements qui organisent ce face à face en leur donnant vie. Il a construit sa mise en scène en emboîtant avec précision toutes les pièces du puzzle, comme celles d’une pièce policière : redoutable et efficace, mettant en avant la sincérité des jeux.

C’est la première fois que je voyais en chair et en os Patrice Laffont sur scène : il est d’un naturel désarmant. Il s’approprie son personnage avec une telle ferveur qu’il en est crédible à 100%. Un regard perçant, des silences percutants, alliant le cynisme à une présence émouvante ponctuée de rires libérateurs des tensions.IMG_4350

Michaël Msihid dans le rôle du jeune déménageur qui ne sait plus très bien comment il doit se comporter face à ce monstre de présentateur vedette est tout aussi naturel que Patrice Laffont dans sa palette de jeux très étendue. Il est émouvant dans sa sincérité de vouloir comprendre qui il est et où il va.

Chacun à la recherche de « la vérité », Patrice Laffont et Michaël Msihid nous entraînent dans leur folie généreuse d’être sur scène : ils partagent leur bonheur à la complicité évidente.

 

Un jeune auteur bienveillant à l’approche simple, prometteur, un auteur à suivre qui pourrait bien nous séduire à la rentrée avec sa prochaine pièce naviguant dans l’univers du vaudeville…

 

« Dernier carton » au théâtre du petit Gymnase, du lundi au mercredi à 20h.

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