« A » d’Elie Rapp au théâtre La Scène Parisienne dans une mise en scène d’Eurydice El-Etr est une fantaisie sucrée surréaliste à déguster à l’heure du petit déjeuner par la « Compagnie La Royale Breakfast » et si vous n’êtes pas du matin, à l’heure du thé…
Elie Rapp a écrit une comédie fantaisiste, survitaminée qui donne la pêche. Dans un rythme d’enfer nous assistons à la naissance d’une histoire d’amour tragique. En effet, nos deux amoureux ont une évolution antagoniste de leur relation qui les éloigne plutôt que de les rapprocher. Il va leur en falloir des efforts, des ruses pour pouvoir assouvir leurs pulsions, leur amour qui ne demande qu’à se concrétiser.
Ali notre Roméo d’un soir souffre du manque d’anticipation, il vit trop au présent et par manque d’anticipation tout lui échappe.
Mais un jour il rencontre Ana, notre Juliette d’une soirée, qui souffre quant à elle d’un excès d’anticipation : l’imprévu lui est inconnu et les obstacles pleuvent comme à Gravelotte dans son existence, la privant de tout bonheur.
Leur seul point commun la lettre A.
Cette lettre A va faire toute la différence dans cette rencontre et va se décliner à l’infini tout au long de leur histoire, qui se veut romanesque.
Un conseil avant de venir assister à leur rocambolesque périple, révisez dans votre dictionnaire le chapitre de la lettre A : A aussi comme Amour.
Une belle histoire qui se présente comme un poème moderne, surréaliste. Un hymne à l’Amour où l’espoir se taille une place de choix.
Que seraient nos vies sans ce doux parfum qui embaume nos cœurs, nos âmes, laissant de côté notre raison ?
Faut-il toujours rationaliser notre parcours, emprunter les chemins tracés par les bien-pensants ou faut-il lui laisser une place pour l’aventure, pour l’inconnu ?
Tel est le dilemme que rencontrent nos deux tourtereaux. Chacun voulant se rapprocher de l’autre va devoir combattre ses démons, mais à quel prix ? Se renier ou entrer dans un autre monde ? Celui de l’Amour, du partage.
C’est par une série de situations plus comiques les unes que les autres, jouées avec sincérité, sans doute piochées dans son histoire personnelle, qu’Elie Rapp (à l’univers particulier) nous propose dans son écriture aux répliques d’une fraîcheur bienfaisante, une rencontre de deux personnes perdues dans leur histoire, une histoire touchante à bien des égards.
Les mères bien sûr seront présentes dans cette aventure, que ferions-nous sans elles ?
Ces mères souvent adorées, parfois rejetées, qui nous ont donné la vie, et quelle naissance sur scène !
Ou celle du dentiste, nous plongeant dans des souvenirs cruels : mais n’est-ce pas la souffrance des autres qui nous fait rire ?
Ou encore cette scène envoûtante du tango à la Gotan Project ?
En bref, une course poursuite contre le temps où vous réviserez le temps nécessaire à la cuisson des œufs…
Laissez-vous porter par leurs délires procurant des rires à foison.
Eurydice El-Etr a mis en scène, dans un souci du détail indispensable, cette loufoquerie dans un rythme endiablé ne laissant par le temps aux comédiens de souffler. Une dynamique réjouissante mais certainement épuisante pour eux. D’ailleurs ils sont omniprésents sur scène où leurs accessoires et costumes de Boudon d’manchette sont plus importants que le décor.
Elie Rapp, pour mémoire l’auteure de la pièce, joue le rôle d’Ana, celle qui court toujours après le temps comme dans Alice au pays des merveilles. Une présence éclatante au sourire ravageur avec un petit air chouette de ne pas y toucher.
Thomas Drelon, son amoureux Ali, son rôle principal, nous touche également dans ses personnages annexes, donnant de l’épaisseur à l’intrigue. Il est rempli d’humanité, son brin de naïveté fait fondre l’assistance. Une présence lunaire bien sympathique.
Celui qui m’a complètement séduit c’est Vincent Paillier à la palette de jeux très complète, il a une présence sur scène remarquable de justesse, de conviction. Un homme à la stature longiligne, qui est très à l’aise dans la peau des femmes, aux expressions, aux intonations et aux silences impressionnants. Il est à la fois tellement convaincant dans le rôle de la mère « Andrée » que dans celui du curé, qu’il en est désopilant.
Il joue une vingtaine de personnages dans un rythme de changement hallucinant, rien ne lui échappe, rien n’est laissé au hasard, il les maîtrise jusqu’au bout des doigts : une performance de comédien à souligner.
Ne restez pas dans l’expectative, prenez la pilule d’Anticipation tous les lundis, mardis et mercredis à 19h à la Scène Parisienne, jusqu’au 31 décembre : vous m’en direz des nouvelles !
Merci Bruno pour ce billet qui m’a convaincue d’aller voir la pièce. Très bon moment !
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Ravi de vous avoir rendu service et bonne continuation 😉
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