« Le choix de Gabrielle » est de mourir dans la Dignité mais « Il faut du courage pour vivre ; plus encore pour mourir » Charles Régismanset.
Danielle Mathieu-Bouillon a écrit et mise en scène ce spectacle qui certes parle d’un sujet d’actualité fort, intense, chargé d’émotions mais qui est avant tout une pièce de théâtre.
Avec son texte poignant, dans un dialogue juste, aux répliques qui évitent l’écueil du pathos même si les larmes peuvent faire leur apparition, les deux comédiennes, à la complicité évidente et indispensable, font sourire et rire malgré les situations évoquées et traversées lors de leur voyage dans la recherche de la dignité.
Mourir dans la dignité : sommes-nous capables d’accepter cet acte d’amour avec tout ce qu’il comporte ?
La dignité dont chacun de nous a le droit d’accueillir la délivrance au moment de son choix.
« On naît, on vit, on meurt » tel est le credo de Laure, jouée par Bérengère Dautun, qui vit en vase clos dans son récent veuvage en communiquant avec son mari.
Une femme d’apparence douce, fragile mais qui au fond d’elle-même a une force de caractère qui lui donne une rage de vivre, qui lui permet de traverser les épreuves de la vie ; vie qu’elle a pu chérir en tant qu’infirmière et dont elle connaît la valeur.
Cette vie de veuvage est troublée par l’apparition de Léa, jouée par Sylvia Roux, une jeune femme à la chevelure de lionne remplie d’énergie, bondissant sans cesse pour évacuer son stress, son désir de vengeance. Une pièce qui commence comme un thriller : mais que recherche Léa dans sa confrontation avec Laure ?
Une jeune femme qui s’est retranchée dans l’étude du comportement de la mort dans les civilisations pour essayer de comprendre ce dont elle a été privée, le passé dont elle se sent spoliée. En quête de vérité, elle qui a été écartée par sa mère pour être préservée de la vie.
Comprendre qu’il faut accepter le choix de mourir dans la dignité même si cela peut engendrer des manques, des douleurs.
Une jeune femme à l’apparence dynamique mais qui au plus profond d’elle-même vit avec une grande fragilité qu’elle ne peut maîtriser, accepter, si ce n’est par le dialogue, l’explication ; et vous comprenez que Laure sera le personnage clé qui lui permettra d’ouvrir toutes les portes.
Le geste de la délivrance est important, tout autant que celui de la parole, pour comprendre, analyser, accepter et reproduire ; la vie n’est elle pas un éternel recommencement ?
Pas besoin de décor pour voir évoluer ces deux superbes comédiennes au pouvoir émotionnel indéniable, ces deux générations de femmes fortes au courage qui se dévoilent au fur et à mesure de leurs échanges et dont la musique de Michel Winogradoff leur donne une légèreté salvatrice dans la douceur des lumières de Robin Laporte.
Les premières notes, avant même la première réplique, nous plongent dans un univers dont on ne sort pas indemne.
Dans cette ode à la vie de cette comédie dramatique, la question de mourir dans la dignité est posée et c’est à vous d’avoir votre réponse.
Magnifique première, ce mercredi 12 décembre, où nous avons été enrichis par le jeu remarquable de Bérengère Dautun et Sylvia Roux : une très belle leçon de comédie.
Nous avons pu ensuite à l’issue de la représentation avoir un échange avec l’auteure et les comédiennes. J’y ai apporté ma petite contribution, car j’ai vécu il y a trente ans la même situation qui sert d’intrigue à cette pièce et je peux vous dire que les dialogues sont d’une justesse incroyable.
Bien évidemment, ce billet a été, tout comme celui de « Oscar et la dame rose », difficile à écrire tant les émotions affluent au moment de coucher les mots sur le papier, mais ce sont deux pièces qu’il faut voir, chacune différente dans leur approche de la vie, de la mort mais tellement libératrices.
« Le choix de Gabrielle » au Studio Hébertot, les mercredis à 21h jusqu’au 20 février 2019.